13 Feb
13Feb

Admission

Dans les théâtres importants de la province, c’est au scrutin, et à la majorité des voix, que se décide le sort des artistes qui viennent effectuer leurs débuts au commencement de chaque année théâtrale. Ceux des spectateurs qui prennent part au scrutin votent l’admission ou le rejet de l’artiste dont le talent est soumis à leur appréciation. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie.

James Hayllar. Peintre – 1829-1920 At the Theatre


Banquiste

C’est la qualification qu’on applique à certains directeurs de théâtres de province qui font ‘de la banque’, c’est à dire une réclame effrénée et grossière qui les fait plus ressembler à un chef de saltimbanques qu’à un entrepreneur sérieux et à un artiste. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie.

Agence de presse Meurisse. M. Habrekorn, directeur de théatre. 1914. Source gallica.bnf.fr / BnF


Brûler une ville

Expression usitée dans les théâtres de province, et qui est moins incendiaire qu’elle ne le paraît tout d’abord. On dit d’un directeur qu’il ‘brule une ville’ lorsque, pour attirer le public et forcer les recettes, il emploie les moyens les plus excessifs : spectacles extraordinaires, bénéfices, acteurs en représentations, etc. Il épuise ainsi toutes les ressources que cette ville peut offrir, et elle est comme brûlée pour le directeur qui vient ensuite et qui, malgré tous ses efforts, se trouve dans l’impossibilité d’en rien tirer. C'est un terrain surchauffé qu’il faut laisser pendant quelque temps en jachère. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie

Spectacle Gratis. Avant scène. Hippolyte Bellangé (1800-1866) Peintre, dessinateur, graveur et lithographe français


Cachet

Semblable à ces médailles effacées dont le type inaperçu a l'air commun à toutes ; le talent de la plupart de nos auteurs, de nos comédiens et de nos compositeurs est sans cachet, original. Il faut cependant, en faveur de quelques-uns d'entre eux, faire une honorable distinction. Talma imprime le cachet du génie à la plupart de ses rôles tragiques ; Mademoiselle Mars donne à tous les siens le cachet de l'intelligence la plus délicate ; Potier marque ses bouffonneries du cachet de la folie vive et spirituelle ; Désaugiers chante en joyeux gastronome : il a le cachet du ventre. Grétry plaît par la grâce et la finesse ; Boïeldieu charme par la douceur et l'élégance ; Rossini entraîne et séduit par la hardiesse et la nouveauté de l’expression. Ces trois compositeurs ont un cachet : il est plus facile de les critiquer que de les imiter. 

Dictionnaire théâtral ou douze cent trente-trois vérités Paris. Chez J-N Barba Librairie. 1825.


Carcassier, charpentier

Carcassier : Habille dramaturge, dans l’argot des coulisses. On dit aussi Charpentier. Charpentier : Celui qui agence une pièce, qui en fait la carcasse, dans l’argot des dramaturges, qui se considèrent avec quelques raisons, comme des ouvriers du bâtiment.


Contremarque

Carton-monnaie d'une valeur idéale. Taglioni, Mars., le tiennent eu hausse ; devant certains théâtres il est en baisse, quelquefois on le donne comme carte d'indigence. 

Petit dictionnaire des coulisses Publié par Jacques-le-souffleur ‘se vend dans tous les théâtres’ - Paris 1835

"- Mon Révérend, avant de proclamer l'infaillibilité des Papes, prenez-moi une contremarque pour ce qui se joue là-dedans" Daumier, Honoré , Dessinateur-lithographe Walter frères , Imprimeur-lithographe Arnauld de Vresse , Marchand d'estampes Le Charivari , Editeur En 1870 Maison de Victor Hugo - Hauteville House


De par et pour le peuple

Depuis plus de cent cinquante ans, tous les gouvernements qui se sont succédé en France ont eu la coutume de faire donner par les théâtres de Paris, en des jours de réjouissances publiques et pour des circonstances solennelles, des représentations gratis dont ils payaient les frais. Ce que Louis XV et Louis XVI avaient fait à de nombreuses reprises, le gouvernement révolutionnaire le fit à son tour, et dès 1793, organisa sur la plupart de nos théâtres des spectacles gratuits qui étaient d’ailleurs particulièrement soignés et qui attiraient une foule énorme. Les gouvernants d’alors avaient trouvé une singulière formule pour caractériser ces spectacles ; ceux-ci étaient donnés, disaient-ils, de par et pour le peuple, et cette mention était en effet imprimée, en gros caractères, en tête des affiches qui les annonçaient. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie

Au nom du peuple Français. Égalité. Liberté. Charlier et Pocholle, representans [sic] du peuple… ‘Considérant, que le dernier jour des sans-culotides doit être exclusivement consacré à la joie ;… Imprimerie Républicaine, Imprimeur. En 1794. Musée Carnavalet.


Entrées de faveur

On appelle entrées de faveur la faculté accordée à certaines personnes, par l’administration de tel ou tel théâtre, d’entrer dans ce théâtre quand il leur plaît et d’assister au spectacle sans payer. Un registre contenant les noms de toutes les personnes qui ont leurs entrées est déposé au contrôle de chaque théâtre pour éviter toute erreur, et ces personnes n’ont qu’à donner leur nom pour qu’on les laisse pénétrer dans la salle.  Il va sans dire que les théâtres ne garantissent aucune place à cette catégorie de spectateurs, qui, s’il n’en est point de libres, doivent se contenter de se tenir debout dans un endroit quelconque de la salle où ils puissent le faire sans gêne pour le public. Les entrées ne sont pas toujours une faveur pour ceux qui en jouissent, et représentent même parfois pour eux une obligation.  Les critiques et les courriéristes de théâtre, par exemple, les médecins de service, le capitaine de pompiers, sont dans ce cas. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie

Adolfo Lozano Sidro (1872-1935) Dans les loges royales


Faire évacuer la salle

Ceci est un droit qui n’appartient qu’à la police et dont elle n’use, on le comprend, qu’en cas de troubles graves se produisant dans un théâtre, et seulement à la dernière extrémité.  On a vu certains ouvrages à allures politiques exciter de telles colères parmi les spectateurs, provoquer entre ceux-ci des scènes si violentes, parfois si sanglantes, que la police ne pouvait se dispenser d’intervenir, et que le seul moyen pour elle de rétablir l’ordre était de faire évacuer la salle. D’autres fois, en province surtout, les spectacles consacrés aux débuts d’une troupe nouvelle étaient aussi le signal de conflits et de désordres sans nom, de rixes brutales, auxquels on ne pouvait mettre fin que par l’évacuation de la salle. Dernièrement encore, à Lille ou à Roubaix, la représentation d’un ancien drame de Monvel, les Victimes cloîtrées, donna lieu à des scènes si scandaleuses qu’on dut avoir recoure à ce moyen énergique. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie.

Jean Braud (1848-1935) Sortie de loge à l'Opéra


Faire l'affiche

Que fait dans le silence du cabinet de la régie, ce directeur, la tête penchée dans ses deux mains ? les régisseurs, en silence autour de lui, rangés, sont plongés dans une profonde méditation ; il fait l’affiche, il prend la plume, écrit, efface, avec quelle anxiété il lit une lettre qu’on vient de lui remettre ! son polichinelle est malade ; Jocko est enrhumé, il ne pourra pas danser, à moins qu’on ne lui donne deux cents francs pour acheter de la réglisse ; le tyran a une extinction de voix , et l’ingénue est en couche. Le directeur fait des récriminations sur le peu de complaisance de ses sujets ; c’est lui qui donne le pain quotidien à l’administration : le public, accoutumé aux gambades, rit aux sombres horreurs du mélodrame. Nécessité fait loi, vaut mieux petite recette que salle fermée, la main du directeur se met en œuvre, l’affiche est faite, deux bons gros mélodrames sont couchés dessus !

Théâtre de l'ambigu-comique. Compère Guillery, mélodrame ; 4e tableau, la ferme du Ravin. 1860. Source gallica.bnf.fr / BnF


Dans le silence du cabinet de la régie, voyez cet homme plongé dans une profonde méditation, c’est le directeur d'un théâtre qui calcule l’effet que doit produire l’affiche du lendemain. Il y a deux effets physiques dans ce morceau de papier collé sur le mur, il agit sur les masses des curieux, tantôt par attraction, tantôt par répulsion. C’est donc un art bien utile que celui de la composition d’une affiche.
L’homme à qui je reconnais le plus grand talent pour faire l’affiche, est un directeur ambulant qui, après avoir engagé le spirituel improvisateur, Eugène Pradel, à donner une séance dans une des contrées les moins civilisées de la Saintonge, avait cru faire une vive impression sur les habitants en faisant ainsi l’annonce de l’affiche :
Il vient d’arriver en cette ville ‘UN NAIN Provisateur’ Qu’on juge de la surprise des spectateurs en voyant entrer en scène un gaillard de cinq pieds six pouces. Il fut fort difficile de calmer les esprits.
Les affiches observent entre elles un certain rang. Celle de l’Académie royale de musique les domine toutes ; les théâtres secondaires se rangent au-dessous, comme par respect. L’afficheur est un maître de cérémonies, qui fait ranger le long des murs ces annonces parlantes.
Il devrait bien exister entre les directeurs des théâtres de vaudevilles, un pacte par lequel ces messieurs renonceraient à l’habitude de lutter de dimension dans leurs affiches. Il est temps que cet abus cesse, d’abord par économie de timbres, puis ensuite parce que les murailles ne présenteront bientôt plus assez de surface aux vastes placards des représentations.


Location

Lorsqu’on veut s’assurer à l’avance une ou plusieurs places dans un théâtre, pour un jour précis, on les prend ‘en location, c’est-à-dire qu’on les choisit à son gré et qu’on les paie d’avance, au lieu d’attendre le jour du spectacle et de risquer de n’eut point trouver et d’être mal placé, s’il agit d’une pièce à succès. Mais le théâtre ne vous accorde cet avantage (en France du moins) qu’en échange d’une surtaxe sur le prix ordinaire des places que vous retenez ainsi, surtaxe qui atteint au moins le dixième et souvent le cinquième de ce prix.  En un mot, le prix des places en location est toujours sensiblement plus élevé que celui des places prises au bureau. Au reste, on ne délivre en location que les loges et les places d’une classe un peu élevée ; les petites places : parterre, dernière galerie, dernier amphithéâtre, ne se louent point d’avance et ne se prennent qu’au bureau. 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie.

Albert Guillaume (1873-1942) Au théâtre


Ordre de début

Jadis, au temps heureux des privilèges, et au temps plus heureux encore où les gentilshommes de la chambre du roi étaient chargés de l'administration supérieure des théâtres subventionnés, on accordait à ceux-ci une sorte de droit de préemption sur tous leurs confrères, c'est-à-dire que si l'Opéra, ou l’Opéra-Comique, ou la Comédie-Française trouvait, dans un théâtre de Paris ou de la province, un acteur à sa convenance, il lui faisait adresse par le surintendant un ordre de début. Sur cet a ordre, le susdit acteur était obligé de quitter le théâtre auquel il appartenait, et ce théâtre devait lui rendre sa liberté, en dépit de tout engagement. Que si, par impossible, l’acteur se refusait à l’honneur qu’on lui voulait faire, il lui était interdit de paraître à l’avenir sur aucun théâtre de France, et sa carrière était brisée. Cette façon paternelle d’envisager les droits de l’homme et du comédien avait disparu avec la Révolution ; on la retrouve plus vivante que jamais sous la Restauration. C’était un temps charmant vraiment que ce bon vieux temps ! Quoi qu’il en soit, la révolution de 1880 à tuer l’ordre de début, et celui- ci n’est plus aujourd’hui qu’un souvenir.

Cela ne nous empêchera pas de donner le texte d’un ordre de début, tel qu’il était adressé en 1774 au chanteur Michu, qui devint l’un des acteurs les plus fameux de la Comédie- Italienne : ‘Nous maréchal duc de Richelieu, pair de France, premier gentilhomme de la chambre du Roi, Nous duc de Duras, pair de France, premier gentilhomme de la chambre du Roi, Ordonnons au sieur Michu, actuellement comédien à Nantes, de se rendre à Paris pour y débuter sur le théâtre de la Comédie-Italienne dans les rôles d’amoureux. Paris, ce 3 décembre 1774. signé :  le Maréchal duc de Richelieu ; le Duc de Duras.’ 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie

Portrait de Louis Michu jouant de la guitare, attribué à DERANTON Joseph Musée du Louvre, Département des Arts graphiques

(Louis Michu : Reims, 4 juin 1754 – Rouen, 26 janvier 1801 Acteur du Théâtre de Nantes avant 1775. Sociétaire de la Comédie Italienne :1775-1799. Directeur du Théâtre des Arts de Rouen :1799 -1801.)


Prix (tarif) des places

Autrefois, an temps du monopole et des privilèges, chaque théâtre, après avoir soumis son tarif à l’approbation de l’administration supérieure, n’avait plus le droit de le modifier ni d’y rien changer sans une nouvelle approbation de celle-ci.  Lorsque le régime de la liberté théâtrale fut rétabli par le décret de 1864, les théâtres acquirent naturellement la faculté d’établir à leur guise et de changer aussi souvent qu’ils le voudraient le tarif de leurs places.  Pour sauvegarder toutefois les intérêts du public, l’ordonnance de police du 1er juillet 1864, relative aux théâtres, édicta, dans son article 36, les dispositions suivantes : ‘Le tarif du prix des places, pour chaque représentation, devra toujours être indiqué très ostensiblement sur les affiches en même temps que la composition des spectacles annoncés.  Un exemplaire sera apposé au bureau du théâtre et à tous autres qui pourraient être établis comme succursales. Ledit tarif devra être inscrit en tête de chaque feuille de location, pour que le public soit toujours utilement averti de ses variations. Une fois annoncé, le tarif de chaque représentation ne pourra être modifié.’ 

Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’en rattachent. Paris 1885. Librairie de Firmin-Didot et Cie

‘Voyons… est-ce que vous ne pourriez pas me passer cela à meilleur marché ? … puisque je prends deux places !...’ ; Les provinciaux à Paris. Au théâtre. Destouches, Pierre Louis Hippolyte, Dessinateur-lithographe ; Martinet (imprimeur-libraire), Imprimeur-lithographe ; Musée Carnavalet.

Ordonnance de police.
Faisons défense aux comédiens de jouer passé quatre heures et demie au plus tard. Auxquels enjoignons de commencer précisément avec telles personnes qu’il y aura à deux heures après midi, et finir à ladite heure de quatre heures et demie, et que la porte soit ouverte à une heure précise. Défendons aux comédiens de prendre plus grande somme des habitants et autres personnes, que de cinq sols au parterre, et dix sols aux loges et galeries. Ce n’est pas hier que ce placard a été apposé. Il date de 1609. On peut juger les modifications que le temps a apportées dans l’organisation théâtrale. D’après le tarif des prix, il n’y aurait aujourd’hui que le théâtre des Folies dramatiques à peu près dans les limites du code.  

Petit dictionnaire des coulisses Publié par Jacques-le-souffleur  ‘se vend dans tous les théâtres’ - Paris 1835


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